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PCAET une stratégie ?

PCAET de Grand Paris Sud, un énième plan, où le début d’une stratégie alternative?

PCAET et démocratie participative

Notre appréciation critique du processus d’élaboration du PCAET se confirme au fil des initiatives mises en place par l’agglomération.

Le président de l’agglomération a reconnu dans son allocution introductive à la conférence territoriale du 14 novembre, la nécessité de créer les conditions d’une véritable concertation, ce qui est loin d’être le cas.

Les deux conférences territoriales organisées par GPS les 14 et 21 novembre 2018 n’étaient pas ouvertes au public, seuls étaient invités des représentants d’organismes publics et assimilés, ou quelques rares associations comme notre collectif. Dans ces deux conférences, il ne s’agissait aucunement de revenir sur le diagnostic, les enjeux ou les axes stratégiques du Plan climat territorial, mais uniquement de faire des propositions d’actions, dans un cadre déjà déterminé, pour alimenter le plan d’actions du PCAET. L’idée de pratiquer ainsi une sorte de « brainstorming » pour faire émerger des propositions n’est pas dénuée d’intérêt, mais pose deux questions :

? Pourquoi ce genre d’exercice serait-il réservé aux représentants d’institutions et ne serait pas ouvert aussi au grand public ?

? Pourquoi surtout interroger les participants uniquement sur les actions, sans leur demander au préalable s’ils se retrouvent dans le diagnostic, les enjeux et les axes stratégiques présentés par l’agglomération ?

 

En ouvrant à tous la réflexion sur les premières phases du processus, on ne risquait pourtant pas une perte de temps mais au contraire un gain !

Une caricature de démocratie participative ?

« Aucun souci, la plate-forme participative en ligne dédiée au PCAET sur le site Internet de l’agglomération ouverte à tous est là pour ça… »

Comme il y a maintenant des lieux dédiés à la démocratie participative (il faut faire là où on vous dit de faire…), sortis du cerveau des cabinets spécialisés et bien vendus aux collectivités territoriales, la réponse toute prête de l’agglomération est : « Vous voulez participer au débat ? Vous n’avez pas encore tout dit de ce qui vous intéresse, vous interpelle ? Aucun souci, la plate-forme participative en ligne dédiée au PCAET sur le site Internet de l’agglomération ouverte à tous est là pour ça… »

Poussé par la curiosité et l’envie de « bien faire », on découvre un sondage qui reprend les méthodes très directives utilisées dans les deux conférences, à savoir que l’on vous demande vite fait de classer par priorité les axes stratégiques déjà arrêtés et tout de suite après on vous réclame de remplir des fiches action, parce que bien sûr, des bonnes idées, on n’en a jamais assez ! Soyons optimistes : à la demande de certains teigneux comme notre collectif qui trouve qu’on ne laisse jamais assez de temps à la concertation ou plus certainement, pour obtenir un nombre de « contributions » présentable, l’agglomération a décidé de prolonger l’ouverture de cette plate-forme d’un mois, jusqu’au 15 janvier. Cela ne changera rien, tant que l’agglomération se contentera de ce genre d’ersatz de participation « démocratique », sans construire les moyens permettant aux habitants de s’emparer progressivement des enjeux de la transition écologique, lesquels ne sont pas simples quand on voit par exemple les contradictions traversant actuellement la question de la taxe carbone.

« Cela ne changera rien, tant que l’agglomération se contentera de ce genre d’ersatz de participation « démocratique » »

Il existe des outils de participation démocratique plus sérieux, comme les conférences de consensus, les panels citoyens, ..., déjà expérimentés dans de nombreux pays, dont le but est de favoriser l’appropriation en profondeur des enjeux de société pour mieux éclairer les choix… C’est toute la question de l’acculturation de la population, des services publics, etc.; ce thème figure pourtant dans les items proposés par les conférences et la plate-forme, sans avoir rencontré de grand succès.

En effet, pour s’imprégner d’un nouveau modèle de référence (la transition écologique), encore faut-il savoir de quel changement majeur de modèle il s’agit et si cette urgence est partagée.

Quand on veut précipiter le processus pour boucler le PCAET de l’agglomération avant les élections municipales, que l’on évite le débat sur le diagnostic, les enjeux, ce qui en fait oriente le choix de modèle, on ne donne pas le choix à la population, volontairement ou pas.

« Cet attirail est à côté de la plaque »

Comment dans ces conditions arriver à mobiliser les acteurs sur les enjeux de la transition écologique ? L’agglomération approche la question comme un problème de communication auquel elle répond par des plaquettes distribuées dans les établissements publics, des panneaux d’expositions dans les mairies volontaires, des réunions « itinérantes » avec un petit film de deux minutes et un diaporama résumant la plaquette qui elle-même résume le livre vert élaboré par les services de l’agglomération. Cet attirail est à côté de la plaque, il ne permet pas :

  • d’interroger le modèle territorial à l’oeuvre ;
  • d’avoir un débat « politique au sens étymologique » de fond au sein de l’agglomération.

 

PCAET et stratégie de transition écologique

Dans son allocution du 14 novembre introduisant les conférences territoriales, le président de l’agglomération a dit qu’il y avait une « urgence territoriale » et donc que « L’Administration a un rôle d’exemplarité à jouer ce qui implique un changement de stratégie à tous les niveaux de l’agglo (transversalité, accompagnements, portages, déplacements…), qu’il fallait changer de logiciel environnemental. Encore faut-il s’entendre sur ce que l’on désigne derrière ces mots que l’on retrouve souvent « plaqués » dans les discours… S’agit-il seulement d’améliorer la gouvernance environnementale de l’agglomération en travaillant sur des plus grandes pertinence et efficacité de ses services ? A-t-on établi un diagnostic vraiment critique de la situation de l’agglomération ou un simple bilan des données actuelles ?

Diagnostic, enjeux et proportionnalité de moyens mobilisés

La partie diagnostic du livre vert du PCAET fournit quelques repères chiffrés très amalgamés (les références précises des sources ne figurent pas), on y trouve peu d’analyse des liens de causalité précis des phénomènes mesurés. C’est sans doute une des raisons de la difficulté à bien cerner le degré des urgences.

Du coup les enjeux identifiés sont présentés en termes très généraux, ils sont peu situés dans une analyse des problématiques d’urgence.

Comme l’intensité des enjeux est traitée trop légèrement, la proportionnalité des actions programmatiques à mener est très insuffisante.

« Il y a « 350 000 émetteurs » de Gaz à Effet de Serre (GES) sur le territoire (ensemble des habitants). »

Un exemple : le livre vert met en avant l’opération des « familles à énergie positive » qui part d’une bonne démarche, mais ne touche que quelques dizaines de familles, alors qu’il y a « 350 000 émetteurs » de Gaz à Effet de Serre (GES) sur le territoire (ensemble des habitants).

De la même façon les fermes urbaines ou les réseaux de chaleur sont mis en avant, mais qui ne peuvent résoudre les graves problèmes de l’artificialisation des sols ou la faible qualité énergétique d’une grande partie des logements de l’agglomération. Dans ce contexte, doit-on être dans une démarche de sensibilisation à long terme ou plutôt dans une volonté de mobilisation massive des habitants ?

Par rapport à l’urgence soulignée encore très récemment par le dernier rapport du GIEC (voir article), nous ne disposons que d’un temps très court pour inverser les tendances désastreuses actuelles. Dans ces conditions, que veut dire « changer le logiciel » ? Jusqu’où doit-on changer nos comportements, en restant dans le cadre existant ou non ?

Encore un plan ou un nouveau modèle ?

La faiblesse de l’analyse systémique des questions climat énergie du territoire se retrouve dans la formulation des « axes stratégiques ». Ils sont établis « toutes choses égales par ailleurs », c’est-à-dire, sans vouloir s’interroger sur le modèle actuel de développement de l’agglomération (surdéterminé par le mouvement de croissance vorace déjà ancien des deux villes nouvelles d’Evry et Sénart). Notre territoire a été lourdement impacté par les programmes lancés par l’Etat dans ces deux villes nouvelles (Opérations d’Intérêt National). Depuis plus de 40 ans, nous assistons à une transformation radicale de notre territoire, les aménageurs publics et privés ont construit à tours de bras, logements, entrepôts XXL, méga centres commerciaux, autoroutes, dont la cohérence d’ensemble reste à démontrer.

Des exemples ?

« Le Projet de territoire adopté en 2016 par le Conseil communautaire prétendait vouloir assurer à terme l’autonomie alimentaire des habitants de l’agglomération. »

La réalisation de la Francilienne sur notre territoire, reliée à l’A5 et l’A6, a certes permis de désenclaver Sénart (et au passage de la transformer en Logisticland ou pire, en Sevesoland), mais cela génère maintenant la thrombose quotidienne de milliers de camions et voitures entre Sénart et Evry. De plus, comme le développement économique local a été mal articulé avec les populations venues s’installer dans ces deux villes nouvelles, les très nombreux mouvements pendulaires individuels domicile-travail, Agglo/Paris et Intra Agglo, participent à l’incohérence, renforcée par la faiblesse des transports en commun. Le président de l’agglomération recommande de « ne pas gâcher les énormes réserves foncières du territoire », rappelons aussi au passage que le Projet de territoire adopté en 2016 par le Conseil communautaire prétendait vouloir assurer à terme l’autonomie alimentaire des habitants de l’agglomération

Comment nos élus comptent-ils s’y prendre alors que l’on voit bien que les terres agricoles disponibles pour cela deviennent plus que résiduelles face à la pression des projets d’urbanisation ?

« En l’absence d’une vraie vision stratégique face au défi climatique, le PCAET se limite donc à un catalogue d’objectifs opérationnels hétéroclites peu ambitieux, sans chiffrement budgétaire (le nerf de la guerre !). »

Le Plan Climat Air Energie Territorial de l’agglomération ne :

  • ne s’interroge pas sur ces facteurs ;
  • ne pose pas la question de la nature de la dynamique économique du territoire et de son attractivité, la nature des emplois ;
  • n’étudie pas l’impact de la construction exponentielle de logements, la faiblesse des transports collectifs, il se contente de se donner des objectifs pour améliorer l’existant…

 

En l’absence d’une vraie vision stratégique face au défi climatique, le PCAET se limite donc à un catalogue d’objectifs opérationnels hétéroclites peu ambitieux, sans chiffrement budgétaire (le nerf de la guerre !). Pas de calendrier, pas de tableau de bord, ni de compte à rebours, alors que les scientifiques du GIEC viennent de nous redire que le point de non-retour se rapprochait d’autant que ce que l’on se dispose à faire n’est pas à la hauteur…

« Si effectivement, il n’existe pas de possibilité de remettre en cause le modèle actuellement à l’oeuvre, alors on peut penser que le match est déjà joué pour la transition écologique… »

Pour l’administration de GPS et la plupart des élus, le PCAET n’est-il qu’une figure imposée par la loi ? Ils auront sans doute l’impression d’avoir répondu au cahier des charges, mais ont-ils conscience que la réponse qu’ils proposent n’est pas à la hauteur de l’extrême gravité et urgence de la situation ? Certes, l’agglomération ne peut pas tout, elle n’a pas forcément la main sur tous les phénomènes exogènes qui l’impactent, mais faut-il pour autant se contenter d’agir avec fatalité dans le cadre existant ? Significativement, lorsque nous avions interpellé il y a déjà 4 ans les élus de Sénart sur les difficultés engendrées par la prolifération des sites logistiques, ils nous avaient répondu : le match est joué, one ne peut plus inverser la tendance. Si effectivement, il n’existe pas de possibilité de remettre en cause le modèle actuellement à l’oeuvre, alors on peut penser que le match est déjà joué pour la transition écologique…