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Ces villes qui veulent nous nourrir

C’est un mot désormais à la mode : « nourricier ». Les communes de GPS s’en sont emparées et les villes sont devenue des « villes nourricières ».

Mais qu’entendent-elles par cette annonce ?

Prenons le cas de Savigny-le-Temple. Mme le maire décrit les ambitions du Conseil Municipal, qui a approuvé ce programme à l’unanimité « par ce programme, la ville souhaite sensibiliser ses habitants à la consommation de produits frais et locaux. (..) ils pourrons apprendre à cultiver des variétés locales et de saison, et à maîtriser le jardinage respectueux de l’environnement ». Comment ne pas applaudir ? Mais voyons les moyens mis en œuvre.

Savigny le Temple est une cité particulière, en ce sens qu’elle est constellée d’espaces naturels : espaces verts, petits bois, forêt classée, prairie urbaine, plan d’eau. Elle est également entourée de terres agricoles, aujourd’hui protégées dans le PLU (Plan Local d’Urbanisme).

La ville a donc développé un projet « Agriculture et Nature en ville », dans le but de produire des produits locaux « bio », et de faciliter l’accès pour tous aux espaces verts. Les potagers et les vergers devraient devenir des lieux d’enseignement du jardinage, d’horticulture, du recyclage et de la fabrication de compost.

L’ambition de la ville est de doubler, d’ici la fin du mandat, la capacité bio des 11 restaurants scolaires, en faisant passer de 25 à 50% le volume de fruits et légumes issus de l’agriculture biologique.

Des projets sont annoncés pour arriver à ce résultat : implantation de « Soli-serres »1 sur un terrain de 1500m2, et création d’un jardin public nourricier de 1350m2. De plus, il est prévu de produire des endives ou des champignons dans des espaces inoccupés en sous-sol d’immeubles.

Ces projets viennent en plus du potager bio de 1ha, déjà en activité, et qui sera étendu de 1500m2. Le potager du Domaine de la Grange devrait être converti en bio, ainsi que le verger du Coulevrain. Et enfin, une ferme maraîchère devrait être créée sur 3,7 ha.

A Ris Orangis, « l’agriculture bio s’implante ». Un projet de maraichage bio va être porté sur 13 hectares de terres à l’abandon depuis longtemps. Dix mois de préparation seront nécessaires, et à l’automne, des agriculteurs sélectionnés pourront commencer à y développer leur activité.

A terme, ça représentera : 14 ha d’agriculture biologique – 6 ha de jardins familiaux – 1 jardin partagé – 2 projets d’agriculture en ville

Corbeil-Essonnes va rénover 6000m2 de jardins, et relancer les jardins familiaux de Robinson, soit une cinquantaine de parcelles de 75 à 200m2. La monoculture et le produits chimiques y seront interdits. En 2023, d’autres jardins devraient voir le jour aux abords du Cirque de l’Essonne, et d’autres sont également à l’étude.

Quant à Moissy Cramayel, sa ferme urbaine a vocation d’alimenter en légumes bio la restauration scolaire. La culture des terres a démarré fin 2017. Sur une superficie de 2,6 hectares, la ville cultive une parcelle de 5 000 m2 dont 550 m2 sous serre.

Alors, on l’aura compris, la culture maraichère urbaine, est à la mode. C’est bien, c’est utile, et éducatif, et en période de confinement, c’est un bol d’air qui peut être appréciable.

L’aspect éducatif est intéressant et c’est vrai qu’il faut guider le consommateur vers des moyens plus sains de se nourrir, expliquer la réalité de la nature qui n’est pas forcément évidente aujourd’hui. Quand peut-on manger des tomates ? Comment sait-on que les pommes de terre sont bonnes à récolter ?...

Cependant, reconnaissons-le, avant d’être en autonomie, il faudra un peu plus de moyens. D’autant plus que de confier certaines terres aux particuliers n’apportera rien dans les assiettes des cantines scolaires. Il faudra donc se tourner vers les professionnels, mais ceux-ci ne pourront pas se contenter de quelques parcelles disséminées ici et là dans les communes. Le terme « nourricier » est peut-être un peu excessif, d’autant plus que ces mesures ne bénéficieront qu’à une petite fraction de la population.

Se repose donc la question de la sanctuarisation des terres agricoles qui nous entourent, en particulier sur Sénart, et qui pour beaucoup sont encore sous le régime des baux précaires émis lors de la création des villes nouvelles, et destinées à être bétonnées.

L’exemple des Vergers de Lieusaint est particulièrement frappant. L’EPA, Etablissement Public d’Aménagement, a cédé une partie du Verger (en exploitation), à un promoteur, afin qu’il construise des bâtiments à usage de bureaux. Des arbres fruitiers ont déjà été arrachés malgré l’opposition d’un collectif. Sept maires de Grand Paris Sud font partie du conseil d’administration de l’EPA, mais n’auraient rien vu venir. Désormais, ils s’affichent comme étant contre la destruction du restant du verger.

On pourrait également parler du verger de Cesson qui lui aussi est appelé à être rasé en grande partie, pour être remplacé par des immeubles d’habitation.

Il est temps que les élus se rendent compte de leurs propres contradictions. Comment prôner une ambition « nourricière » et supprimer les terres agricoles (en dépit de la directive ZAN Zéro Artificialisation Nette) ?

16 05

1 Serres solidaires

Références

  • Savigny :https://fr.calameo.com/read/0061804196f39a6bb3fbe
  • Ris : https://www.mairie-ris-orangis.fr/ville/travaux/les-travaux/lagriculture-bio-sim-plante/
  • Moissy : https://www.moissy-cramayel.fr/?q=l%C3%A9coquartier-de-larboretum-de-chanteloup/laferme-
  • urbaine
  • Corbeil : https://www.corbeil-essonnes.fr/actualites/cultivez-vos-legumes-et-la-convivialite/
  • GPS : https://projets.grandparissud.fr/agriculture-et-alimentation

Date de dernière mise à jour : 10/04/2021

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